dimanche 1 février 2015

Journal de bord, Janvier 2015

Bonjour à tous !

Nouvelle année, nouvelles résolutions, cela vaut pour moi aussi. J'ai décidé de me faire plus rare sur ce blog, car mon agenda exige autre chose de moi désormais. Néanmoins, ces nouveaux rendez-vous, mensuels, seront aussi plus denses. Et je ne m'interdis pas de faire un post supplémentaire lorsque j'estimerai que l'actualité l'exigera. Ceci étant dit, passons maintenant au vif de notre sujet.

Le fait marquant : la série d'attentats de la première quinzaine de Janvier

Tout s'est déroulé en quelques jours. Une litanie de drames, ponctués par des meurtres et des coups de feu. Des journalistes, des caricaturistes, un économiste, une policière et des Juifs. Tous sacrifiés sur l'autel d'une idéologie obscurantiste venue du tréfonds du Golfe Persique. Tués pour la nécessité d'une vengeance aveugle. Exécutés pour une fatwa, dans le cas des malheureux de Charlie Hebdo, pour protéger une fuite dans le cas de la jeune policière ou simplement parce qu'ils étaient juifs concernant les morts de l'Hyper Cacher. Cela devait finir par arriver. Notre pays était presque devenu trop calme, comme endormi dans une sorte de léthargie, pensant que les attentats de 1995 étaient les derniers d'une longue série qui touchait à sa fin. Pourtant nous n'avons jamais été à l'abri. Mohamed Merah fut un premier sérieux avertissement. Tous les Français qui partent comme des moudjahidines en Syrie sont autant de membres constitutifs d'une cinquième colonne qui n'interpelle pas les pouvoirs publics. Bien sûr, on est encore plus surpris et meurtri parce que ce sont des journalistes qui sont morts, dans le but bien précis de venger un Prophète soi-disant offensé, mais le résultat est là : la menace terroriste est bien présente sur notre territoire.

Quelles leçons tirer de ces atrocités ?

Il y aura, peut-être, un avant et un après. Seul le temps long permettra de le dire. Dans une société qui privilégie l'immédiateté à la réflexion, à la dialectique et aux problématiques multiples, il convient de garder la tête froide. Cependant, si il devait y avoir de profondes conséquences après cette série d'attentats, il faudrait alors garder à l'esprit que notre pays, décidément bien différent des autres, connaît régulièrement de profondes modifications après un bain de sang : la Guerre de Cent Ans déboucha sur la Renaissance, la Révolution Française fit chuter la monarchie et les deux guerres mondiales aboutirent à la chute de l'Empire colonial ainsi qu'à la Ve République. 
Cette atteinte profonde à notre liberté d'expression a eu une première saine réaction, celle du 11 Janvier. Il y a eu des couacs, je ne reviendrai pas dessus, car il convient d'en garder l'image résolument positive qu'elle souhaitait véhiculer. Et puis il y a eu toutes les discussions d'après. La police qui perd un peu la tête avec toutes ces procédures ouvertes pour "apologie du terrorisme", une école qu'on remet à nouveau au centre de toutes les interrogations et un islam qui pose toujours question. 

Pour un Islam de France

En 1807, Napoléon convoqua le Grand Sanhédrin, sorte d'assemblée oeucuménique des religieux juifs, leur intimant l'ordre de prendre les mesures nécessaires afin que le judaïsme soit solvable dans la Nation française. L'Empereur obtint gain de cause et aujourd'hui la pratique de la religion juive ne pose guère de problèmes. Alors que la religion musulmane est numériquement bien plus importante en France que la religion juive (deuxième religion de France aujourd'hui), on se demande pourquoi il n'y a pas de mesures concrètes pour la création d'un Islam de France. Cela montrerait la bonne volonté des musulmans de France à s'assimiler dans la République et permettrait d'identifier plus clairement nos adversaires, qui sont les fondamentalistes de cette religion. Sans compter que former des imams qui respectent la République n'aurait que des avantages.
Au lieu de cela, on préfère entraîner la confusion : "pas d'amalgames" a-t-on aussitôt crié après les attentats. "Les premières victimes sont les musulmans" a-t-on répété à l'envi (1). Autant de slogans qui sèment le trouble, les premières victimes de ces horreurs étant bien évidemment ces pauvres gens victimes des attentats. Quant au "pasdamalgamisme", il donne la nausée à force d'être répété en boucle. Lorsque l'on crie "Allahu Akabar" et "On a vengé le prophète", on agit en tant que musulman, qu'on le veuille ou non. Nul n'est accrédité pour dispenser des brevets de bonne ou de mauvaise pratique de l'Islam. A contrario, un musulman qui boit de l'alcool ou mange du porc parce qu'il en a fait le choix est-il un mauvais musulman ? Non. Quand la guerre civile en Irlande du Nord a éclaté, a-t-on demandé à ne pas faire d'amalgames entre les catholiques et les protestants d'un côté, et les soldats anglais protestants et les terroristes de l'IRA, catholiques, de l'autre ? Non. S'est-on demandé si on commettait des amalgames l'an passé avec la Manif pour Tous en traitant d'extrémistes ceux qui, parmi les manifestants, se réclamaient du catholicisme ? Pas davantage. Il est grand temps d'appeler un chat, un chat. Ces terroristes sont musulmans, point. Une fois qu'on aura compris ça, on aura fait un grand pas dans le combat contre la récidive de ce genre de drame.

Des enfants déboussolés

L'autre question soulevée est celle de la réaction des élèves dans les établissements scolaires. Fort heureusement, l'écrasante majorité d'entre eux s'est associée au deuil national. Mais pas tous. Entre ceux qui croyaient à la théorie du complot et ceux qui disaient que c'était mérité, eu égard à ce qu'ils estimaient avoir été des offenses répétées envers le Prophète, certains enseignants ont eu de mauvaises surprises. Ne minimisons ni n'aggravons pas ces incidents. Ils restent des cas isolés et les élèves restent des mineurs, des enfants. Il est connu, inévitable même, qu'un enfant va avoir tendance à répéter comme un réflexe ce qu'il entend autour de lui, notamment dans sa famille, à la télévision ou sur Internet.
Et c'est là qu'il faut réellement intervenir. D'abord, il faut que les parents prennent conscience de ce qu'ils inculquent à leurs enfants. Ensuite, il faut redonner à nos bambins l'innocence qui sied si bien à leur jeune âge. Il n'est pas sain de laisser un enfant constamment derrière un écran, de même qu'il paraît problématique de le laisser s'aventurer sur tel ou tel réseau social face auquel il ne peut être armé pour s'en protéger. Les cas répétés de suicide d'adolescent suite à un harcèlement sur ces fameux sites sont là pour en attester. Un enfant doit être sensibilisé au sport, à l'art, à la vie sociale réelle, tangible, physique, au respect de l'autorité, à la valeur de la transmission... Autant de choses qui lui permettront de s'ouvrir au monde avec du recul, de la mesure, et un vrai bagage intellectuel. Dans cette optique, faire de l'enseignement numérique la panacée de l'enseignement de demain ne me paraît pas une bonne idée. Les écrans ne se substitueront jamais aux livres et à l'enseignant. Il ne me paraît pas pertinent de permettre aux élèves de passer encore plus de temps devant des écrans qui vont leur abîmer les yeux. Et je ne parle même pas du coût prohibitif de l'opération qui se fera au détriment du recrutement d'un personnel qualifié, dévoué, et décemment rémunéré.(2)

Le point éco : Draghi hors-jeu

Il s'est passé d'autres choses ce mois-ci qui méritent d'être évoquées. Mario Draghi, le directeur général de la Banque Centrale Européenne, a décidé de racheter de la dette des états membres. Pour cela, il fait donc tourner la planche à billets, faisant baisser la valeur de l'Euro. Jusque là, du tout bon : les dettes nationales sont garanties par la BCE et la baisse de l'euro doit permettre aux entreprises européennes, françaises notamment, d'exporter davantage. Sauf que... L'Euro est déjà en chute libre face à un Dollar qui reprend du poil de la bête. C'est quelque chose que l'on apprend dans ses premiers cours d'économie : on ne fait JAMAIS tourner la planche à billets quand le cours de la monnaie est déjà en baisse, sinon on risque un effet d'entraînement qui débouche sur une inflation non contrôlée. C'est quand le cours de la monnaie s'apprécie qu'il faut au contraire multiplier les billets comme les petits pains, afin de laisser l'économie respirer. Décidément, Draghi a tout faux. Rappelons qu'il avait participé au trucage des comptes de la Grèce ayant permis à cette dernière d'entrer dans l'Europe.

Le point international : bravo Syriza

Alexis Tsipras a réussi son pari : passer en quelques années du statut de trouble-fête à celui de premier parti de Grèce. En s'alliant avec les Grecs indépendants, il montre que l'important pour ce parti de la Gauche radicale n'est pas de prendre des mesures sociétales mais bien d'assurer l'indépendance souveraine de son pays. Alors que l'Allemagne continue de faire pression pour être remboursée des différentes dettes qu'elle finance, oubliant l'argent qu'elle doit aux victimes des deux guerres mondiales dont elle porte la responsabilité (3), ce retournement politique peut permettre de poser enfin le débat du devenir de l'Europe. Veut-on une Europe uniquement financière qui ne s'intéresse qu'au bonheur du marché au détriment des Nations, de leurs aspirations ? Ou bien veut-on une Europe de coopérations, dans le domaine de la science, de la R & D, tout en laissant libres les pays de décider de leur destin économique et politique ? Voilà le débat, et gageons que Syriza n'est que la première étape de la reconquête de l'Europe par ses peuples. Podemos est également en situation de créer un séisme en Espagne. Si certains se demandent pourquoi l'extrême-gauche progresse à ce point en Europe du Sud, rappelons que ce sont des pays qui, il y a encore 30-40 ans, étaient sous le joug de dictatures fascistes et que, contrairement à la France, la Gauche radicale n'y a encore jamais gouverné. Chez nous en revanche, les Communistes ont participé à de très nombreux gouvernements, les Verts également. Et le chevènementisme prononcé de Marine Le Pen lui permet de ratisser toujours plus d'électeurs. Il n'est donc pas étonnant de la voir dorénavant projetée à 30% dans les sondages...

(1) Lire à ce sujet la tribune de Michel Onfray sur le site du Point
(2) Lire à ce sujet le dernier post de Loys Bonod sur son blog
(3) Les réparations auxquelles l'Allemagne fut condamnée après le traité de Versailles ne sont toujours pas payées. L'Allemagne a, par ailleurs, vu sa dette effacée 4 fois au XXe siècle, la dernière fois en 1953 de la main même des Américains. Les Allemands ont la mémoire courte...