vendredi 19 septembre 2014

Non Monsieur Sarkozy, la France n'a pas besoin de vous !

Nicolas Sarkozy/Crédits Photo : Taamallah - Bestimage - LeFigaro.fr

Bonjour à tous !

Evidemment, l'événement politique du jour c'est le retour de Nicolas Sarkozy aux affaires politiques, à la suite d'un suspense tout sauf intenable. 

Revenir après avoir juré de ne pas le faire : un bien mauvais départ

Il l'avait pourtant promis, juré, craché par terre : si il perdait les Présidentielles de 2012, il ne reviendrait plus en politique. Comme attendu, Sarkozy a perdu, après une campagne de deuxième tour en forme de baroud d'honneur. Alors il est parti. Avant de faire en sorte qu'on ne parle quasiment que de son retour. Mauvais perdant l'ancien Président ? Visiblement. Lorsqu'il déclare (sur son compte Facebook !) que son retour est motivé par les appels incessants de très nombreux Français qui souhaitent son retour, on sourit (jaune) en imaginant de quels compatriotes il s'agit. Ceux qui viennent le voir dans son QG haussmannien de Paris ? Ceux de la loge d'honneur du Parc des Princes (que je sache, la Prince, elle est pas encore français comme dirait l'ami Leonardo) ? Ou bien ceux qu'ils croisaient vraiment par accident lors de ses voyages à l'étranger où il donnait des conférences monnayées plusieurs dizaines de milliers d'euros ? Dans un cas comme dans l'autre, on peut sincèrement questionner les motivations de ces Français-là par rapport au tout-venant qui va mendier un échelonnement pour payer ses impôts auprès du Trésor Public. Et puis si c'est pour devoir supporter la même cacophonie des médiocres qu'entre 2007 et 2012, entre Nadine Morano et Luc Châtel, pour ne citer qu'eux, on peut sans problème se passer de votre retour, Monsieur le Membre du Conseil Constitutionnel. D'autant qu'un homme politique est jugé sur les promesses qu'il tient, et revenir quand on a promis de ne pas le faire, ça fait d'emblée tâche dans le tableau.

Revenir avec quel programme ?

Ne nous leurrons pas : quand Sarkozy a gagné en 2007, c'est parce qu'il avait fait une campagne inspirée par Patrick Buisson, qui avait largement trouvé écho auprès de la classe populaire. La preuve, c'est que le vote FN avait été totalement siphonné. En 2012, et après cinq années où Nicolas Sarkozy s'était beaucoup agité, avait beaucoup vociféré, l'ancien Président avait senti le vent du boulet siffler très près de ses oreilles. L'immigration était restée toujours aussi élevée, il avait choisi de ne pas tenir compte du "Non" au référendum de 2005 en utilisant une entourloupe politique, et il avait joué au bon petit soldat des Etats-Unis en s'engageant dans le conflit en Géorgie, en soutenant le Printemps arabe et mettant à bas le régime Kadhafi. Finalement, Sarkozy était devenu le parfait "neo-con" à l'anglo-saxonne : libéral sur le plan économique et entreprenant à l'excès en politique extérieure. 
Aujourd'hui, Bruno Le Maire et Alain Juppé se sont officiellement déclarés candidats à la présidence de l'UMP. Deux centristes d'un point de vue idéologique, qui sont pour l'Europe, la réduction des déficits et un rapprochement avec le Centre, là où règne un véritable désert en terme de bulletins de vote. Deux idiots qui mourront donc avec leurs idées. Plus encore pour M. Juppé qui, après avoir été Premier Ministre 6 mois en 1995, avait réussi l'exploit de jeter une bonne partie de la France laborieuse dans la rue avant d'être l'initiateur de la vaste blague de la dissolution de 1997. Visiblement, et si l'on décrypte ses prises de parole depuis 2 ans, on se rend compte que Nicolas Sarkozy, qui a coupé les ponts avec Patrick Buisson, ne se positionnera plus sur une droite réelle, forte, patriotique. Mais il souhaite également se démarquer quelque peu de Juppé et de Le Maire. Bref, il va se retrouver coupé en deux et en voulant "rassembler", il sera donc incapable de choisir. Et à force de ne pas choisir, il se retrouvera le bec dans l'eau. Nicolas Sarkozy ne sera jamais Bonaparte, ni le Général de Gaulle. Quand Napoléon revient, il crée le Code Civil. Quand Charles de Gaulle revient, il offre la Constitution de la Ve République à son pays. Et surtout, ces deux hommes ne reviennent pas avec de nouvelles idées comme autant de coups marketing démagogiques. Ils restent fidèles à leurs principes et c'est tout à leur honneur. Dans ces conditions, le retour de Nicolas Sarkozy est donc inutile car il n'a rien à apporter à notre pays.

Un coup d'orgueil mal placé

Entre l'acharnement judiciaire dont je reconnais volontiers qu'il est victime et sa défaite de 2012 toujours pas digérée, on a là tout le nuancier de raisons véritables qui poussent l'ancien Président à vouloir revenir en politique. Il est vrai que cette opération est largement facilitée par le mandat catastrophique de son successeur, Président le plus impopulaire de la Ve République. Mais à l'instar des électeurs qui avaient voté pour Hollande par anti-sarkozysme en 2012, il en sera de même en 2017, si d'aventure l'UMP devait le désigner comme candidat du principal parti de Droite pour les Présidentielles à venir. 
Toujours est-il que cette pathétique réaction d'orgueil plonge un peu plus la France dans le désarroi : notre pays ne mérite-t-il donc pas mieux ? Est-on condamné à passer d'un loser à l'autre, de Charybde en Scylla ? On ne peut que s'attrister d'un tel devenir politique. Et ceux qui, parmi les journalistes et les politiques mainstream, se lamentent d'une telle décision devraient d'abord, et en premier lieu, s'interroger sur leur responsabilité. On ne peut pleurer sur une telle médiocrité de la vie politique, surtout dans une situation économique et sociale aussi grave, tout en fustigeant le pouvoir et son exercice. En se prosternant devant l'Europe, mécaniquement, on diminue, on affaiblit, on ridiculise la fonction présidentielle qui perd de sa prestance. On a alors les Présidents, et les candidats à la Présidence, que l'on mérite. Comme le disait Bossuet "Dieu se rit des hommes qui pleurent sur les conséquences dont ils chérissent les causes."

mardi 16 septembre 2014

Crise de régime : en politique comme en foot, quand les acteurs sont mauvais, il est vain de changer de système

Bonjour à tous !

J'avais eu l'occasion, il y a de cela quelques mois, de critiquer la Commission Jospin sur la VIe République. Or le serpent de mer a réapparu il y a de cela quelques jours, profitant, si j'ose dire, de l'inédite impopularité du chef de l'Etat. 

Ce que veulent les détracteurs de la Ve République

Ce qu'ils réclament, c'est la possibilité de virer un Président et un Premier Ministre notoirement impopulaires pour convoquer de nouvelles élections. Ce qui est très amusant, c'est que ceux qui réclament ce changement se trouvent à gauche, voire très à gauche de l'échiquier politique et qu'en cas de nouveau scrutin, je ne suis pas certain qu'ils trouveraient beaucoup d'électeurs à convaincre. Ces personnes dénoncent notamment les scandales à répétition qui entachent le personnel politique. Je trouve qu'ils n'ont aucun sens de l'humour : la phobie administrative est, sans doute, la meilleure excuse à la noix trouvée par un politique depuis des années pour se dédouaner. Digne d'un Paul Deschanel éjecté de son compartiment de train en pyjama contraint de demander assistance auprès d'un garde-barrière. Culte ! La satisfaction suprême intervenant quand cet arracheur de dents de Cahuzac vient faire la morale à Thévenoud devant les caméras. Un magnifique numéro de duettistes. En ces temps difficiles, avoir des hommes politiques qui se donnent la peine de faire rire les Français, je trouve que ça mérite un hommage... Plaisanterie mise à part, quel que soit le régime, il y a toujours eu des scandales politiques : le collier de la Reine sous la monarchie, le scandale de Bismarck qui utilisait la presse pour ridiculiser la France sous le Second Empire, le scandale de Panama et les emprunts russes sous la IIIe République... Le problème n'est pas inhérent au système politique, mais à la politique elle-même : l'ivresse du pouvoir affecte certains hommes plus que d'autres, prouvant ainsi leur humanité par leur faiblesse. Ils méritent, bien sûr, d'être sanctionnés, mais il est inutile de jeter le bébé avec l'eau du bain.

Un régime parlementaire inapplicable

Comme il faut TOUJOURS faire comme ses voisins selon la nouvelle doxa (j'attends que l'un de nos partenaires européens décide d'organiser un saut de la falaise collectif, qu'on rigole), on nous explique qu'ailleurs en Europe il n'y a pas de régime présidentiel, et que c'est le Parlement issu du peuple qui gouverne avec un scrutin proportionnel. Le Président, en quelque sorte, inaugure les chrysanthèmes. Autant dire que les contribuables de nos voisins européens payent un type à se tourner les pouces pendant la durée de son mandat : pourquoi pas ? 
Je rappelle toutefois qu'il me paraît dangereux de permettre à des sondages de nous gouverner. Or, s'il faut destituer tous les chefs d'Etat qui passent en-dessous d'un certain seuil de popularité, on n'a pas fini de retourner aux urnes. Par ailleurs, le régime parlementaire a bel et bien existé en France, sous la IIIe puis sous la IVe République. Outre les changements de conseil (l'ancien nom de l'ensemble d'un gouvernement) incessants, avec un Président qui faisait effectivement davantage figure de symbole qu'autre chose, rappelons que la IIIe République a abouti à la Débâcle de 40 et l'instauration du Régime de Vichy, tandis que la IVe a laissé place à la crise de l'indépendance algérienne. Vu sous cet angle, j'ai quelques difficultés à saisir l'intérêt nous aurions à retourner à de tels régimes politiques. Quant à la démocratie participative et les référendums d'initiative populaire, avec lesquels on nous rebat les oreilles à longueur de journée, je me permets de rappeler qu'à l'Hiver dernier, une pétition rassemblant pas moins de 700.000 signatures (mazette !) et qui s'opposait à la Loi Taubira au mariage dit pour tous fut remise au Conseil Economique, Social et Environnemental, sorte de 5e chambre d'autorité de notre pays (en sus de l'Assemblée Nationale, du Sénat, de la Cour de Cassation et du Conseil Constitutionnel) : elle fut purement et simplement jetée à la poubelle, sans autre forme de procès. Je ne vois donc pas bien ce qui changerait sur ce point avec une nouvelle constitution. A moins bien sûr que l'on encourage exclusivement les référendums de la Gauche bien pensante. Mais je vous vois déjà froncer les sourcils et agiter l'index en me mettant en garde d'un procès d'intention de ma part : vous avez bien raison.

La Ve République et la Constitution de 1958 : un modèle indépassable

Ce que nos adversaires patentés de la Ve République (dont Montebourg, qui n'est pourtant pas un idiot) oublient dans leurs conclusions, c'est que le système a été parfaitement pensé. En effet, le Président peut consulter le peuple à tout moment sur des questions d'importance. Et estimé qu'une défaite à un tel référendum équivaudrait à une obligation de démission pour convoquer à nouveau le peuple aux urnes en vue d'élire un nouveau Président. C'est dans cet esprit que Michel Debré et le Général de Gaulle ont rédigé ce texte, et c'est dans cet esprit qu'elle se doit d'être interprétée. Lorsque le Général de Gaulle, alors Président de la République, organise un référendum en 1969 qu'il perd (relatif à la créations de régions et à la réforme du Sénat), il démissionne sans demander son reste. Petite parenthèse : on s'aperçoit d'ailleurs en consultant les archives que l'abstention à cette époque était inférieure à 20%, comme quoi la culture civique, ça a du sens. Fin de la parenthèse. 
Or, quand Jacques Chirac organise le référendum sur la Constitution Européenne, c'est le "Non" qui l'emporte. Pourtant il termine son mandat sans sourciller. Il s'agit d'une violation manifeste de l'esprit de la Constitution. Et là les Français peuvent se sentir légitimement trahis. Tout comme les Français peuvent aussi se sentir trahis de ne pas avoir été appelés aux urnes concernant cette fameuse Loi Taubira : un changement de civilisation vaut bien une consultation du peuple non ? Alors quand aujourd'hui on vient me chanter les louanges d'une nouvelle Constitution, qui ne serait finalement que la résurrection de vieux textes déjà usés jusqu'à la corde (c'est fou d'ailleurs comme les progressistes sont finalement atrocement passéistes...), je me permets d'être dubitatif, pour ne pas dire sceptique. Encore un peu et ce sera toute la France qui s'y retrouvera, dans la fosse sceptique !