mardi 27 mai 2014

Europe : la fin de la chimère

Infographie : LeMonde.fr

Bonjour à tous !

J'avoue que je suis pris d'une schizophrénie soudaine, en ce lendemain d'élections européennes : je jubile de voir les partis européistes s'être pris une juste raclée, mais je suis extrêmement triste que cette même raclée soit infligée par le FN, que je ne porte pas dans mon coeur. 

Souverainistes, réveillez-vous !

Cependant, il est dit qu'on retient plus facilement une leçon quand celle-ci est d'autant plus amère à avaler. Depuis au moins 2005, et la farce du référendum sur la Constitution Européenne, qui avait été rejetée par le peuple, mais validée en catimini par les gouvernants (merci Sarkozy...), l'Europe est sous le feu des projecteurs : entre son fonctionnement opaque (3 capitales européennes : Bruxelles, Luxembourg, Strasbourg), des institutions aux rôles mal définis et une gouvernance qui s'exécute finalement à Bruxelles au sein de la Commission dont les membres ne sont pas élus, on ne pouvait qu'aller dans le mur. Et je ne parle pas des élargissements successifs complètements crétins (imaginer que Chypre et l'Italie peuvent apporter autant à l'Europe, franchement, ça relève de l'arnaque intellectuelle, au mieux) et de la crise qui a mis en lumière ce qu'est l'UE : une machine à déréguler, à vider les états-nations de leur moelle, ouvrir le continent à tous les vents, servir la soupe à des banquiers déjà bien gras pendant que le peuple se meurt.... Cette Europe ne peut et ne doit que mourir. Si les anti-européens ne seront pas forcément en mesure de constituer un groupe parlementaire à Strasbourg (25 députés d'au moins 5 pays différents, si les règles n'ont pas changé d'ici là...), ils doivent être en mesure de faire entendre leur voix et de dire qu'il est temps de mettre fin à cette mascarade. En France, on attend un réveil des authentiques souverainistes, gaullistes (Dupont-Aignan, Guaino, Wauquiez peut-être) qui se font pour l'instant siphonner par la Le Pen Corporation, dont le patriarche fut un véhément opposant du Général quant à sa gestion de la Guerre d'Algérie.

Non, il n'y a pas eu d'erreur de scrutin

Libération, qui n'en est pas à son premier coup d'éclat, titrait ce matin La France FN. Rien que ça. Sachant donc qu'arithmétiquement, 25% de 40% de votes exprimés font 10% du corps électoral, cela veut donc dire que les 90% restants sont mis dans le même sac. Ils apprécieront... Sans compter les 10% sus-nommés qui vont à nouveau se faire gourmander pour avoir mal voté. C'est vraiment mal fichu les élections : on a beau reculer l'échéance, il faut quand même finir par y aller, et cet abruti de peuple s'évertue à nous décevoir à chaque fois. On comprend mieux pourquoi ces belles âmes préfèrent l'UE et l'ONU, des organismes où on ne demande rien aux électeurs : on choisit à leur place comme ça, on a toujours bon.... Révoltant !
De même, j'entends çà et là que les Français se sont trompés de scrutin. Erreur, et pour deux raisons : d'une, les Français, qui ne sont pas des idiots, ont parfaitement compris que la politique de l'UMP-UDI-PS-EELV était à la botte de Bruxelles : austérité, Euro fort, frontières ouvertes et ce qui va avec (forte immigration, délocalisation). Ils ont donc fait d'une pierre, deux coups : on sanctionne François Hollande et on fracasse l'UE. Et la seconde raison, c'est que les anti-européens font des scores élevés partout ailleurs, sans toutefois arriver en tête, il est vrai, mais avec des résultats qui ne peuvent passer à l'as : le M5S italien envoie 25 députés à Strasbourg (1 de plus que le FN, soit dit en passant), l'UKIP anglais qualifie 23 des siens, le Danemark envoie également 4 eurosceptiques, leaders de leur scrutin. Et la liste est longue : Hongrie, Autriche, Suède...et même l'Allemagne, où le très récent AfD (Alternativ für Deutschland) arrache 5 strapontins. Et puis il ne faut pas oublier l'extrême-gauche, très présente en Grèce où Syriza arrive en tête devant le parti au gouvernement, et l'Espagne, qui connait également une belle percée des marxistes. Tous ces pays-là se seraient-ils, eux aussi, trompé de scrutin...?
Attention toutefois, ces partis n'ont pas les mêmes motivations, la même histoire, les mêmes objectifs. Mais ils sont unis par un dénominateur commun : le rejet de l'Europe et de l'immigration de masse. Exemple éclatant en France, où le Front de Gauche de Mélenchon a le même programme économique que Marine Le Pen, mais soutient l'immigration. Résultat ? Mélenchon fait 6.5, Le Pen, 24,8. Un enfant de 6 ans comprendrait d'où vient le problème.

Des résultats marquants, et après ?

Le FN a mis 40 ans pour obtenir ce résultat, après avoir frôlé la déflagration sarkozyste entre 2007 et 2010 (Sarkozy reste, quoi qu'on en dise, le seul président à avoir fait baisser les scores du FN depuis 40 ans). Le léger regain de participation sur ces Européennes de 2014 en comparaison des résultats de 2009 laisse penser que le réservoir de voix est plus élevé qu'il n'y paraît pour Marine Le Pen, d'autant que sa base électorale se confirme : les classes populaires et les jeunes. Une base solide, qui ne risque pas de s'étioler. Espérons que les Gaullistes (re-)naissants ne mettront pas autant de temps à s'imposer dans le paysage politique français.
Le PS a deux choix : dissoudre pour se représenter devant le peuple, tel que l'aurait fait De Gaulle. Mais il ne faut pas rêver. Ou bien changer radicalement de cap, tourner le dos à l'Europe et se recentrer sur une politique de Gauche. Eh bien au vu des déclarations (enregistrées, qui plus est - un vrai scandale de mépris envers le peuple !) de Valls et de Hollande, il semble qu'ils aient opté pour une troisième solution, la pire, à savoir : continuer, en opérant des changements à la marge, noyés dans des termes techniques et nappés d'une fausse marque de volontarisme.
Quant à l'UMP, les pauvres... Copé va sauter, reste à se demander quand. Et pour mettre qui, surtout ?! Parce qu'en entendant Juppé hier soir déclarer que la solution se trouve dans un rapprochement avec le Centre, sans un mot pour les gens qui souffrent de cette Europe inhumaine et pesante, c'est presque criminel. Ce parti est au bord de l'explosion. Reste à savoir ce que cela produira. 
Et pendant que ce joli petit monde fait sa cuisine, les crève-la-faim restent au bord de la route et assistent, horrifiés et désabusés, au spectacle d'un monde qui les écrase de toute sa condescendance la plus méprisante...