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Bonjour à tous !
Ad majorem Dei gloriam (1) : telle pourrait être la devise du nouveau Pape, François, puisque issu de la Societas Jesu, l'Ordre des Jésuites. Jorge Maria Bergoglio est le premier pape du genre. Il est également le premier pape des Amériques et le premier pape non européen, au sens moderne du terme, depuis Grégoire III (dont le pontificat se déroula entre 731 et 741).
Nouvel état-civil, parcours atypique, origine exotique : avant même de faire connaître ses premières mesures ainsi que l'orientation générale de son pontificat, le nouvel évêque de Rome est assuré d'entrer dans l'Histoire. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ses confrères du Sacré Collège ont frappé fort en cherchant un symbole, un homme qui pourrait relancer l'intérêt autour du catholicisme. Il n'était pas le favori de ce scrutin (Odilo Scherer, Angelo Scola, Peter Turkson, Luis Tagle ou encore Marc Ouellet avaient les préférences des bookmakers) mais il a su déjouer les pronostics en s'appuyant sur le précédent conclave de 2005 où, vraisemblablement, il avait été le plus sérieux rival de Joseph Ratzinger.
Le premier point à expliquer, c'est ce que sa formation de jésuite a de spécifique. Cet ordre particulier est sans doute le plus exigeant pour ses membres : 2 ans de noviciat (au lieu d'une année dans les autres ordres) et 10 ans d'études en philosophie, sciences et théologie, entrecoupées de 5 années de professorat. La discipline et la hiérarchie y sont des plus rigoureuses. C'est un ordre prédicateur qui entend supprimer autant que possible les intermédiaires entre les croyants et Rome afin de rendre la religion accessible à tous. Cela s'est traduit concrètement dans la vie quotidienne de l'archevêque de Buenos Aires par sa volonté d'être toujours proche des plus démunis et une volonté d'ordinaire : il a refusé son domaine épiscopal pour un petit appartement près de sa cathédrale et n'hésitait pas à prendre le métro. En résumé, son règne pourrait être celui d'un retour à la simplicité évangélique dans l'Eglise avec la mise au pas de la Curie (le gouvernement du Vatican) et un exil des affaires prononcé à l'encontre de tous ceux qui auront porté atteinte à l'image du catholicisme (on pense aux pédophiles et à tous ceux qui concourent à blanchir de l'argent sale).
Les chantiers qui attendent le Pape François sont immenses : il doit redorer l'image de sa paroisse. Les moqueurs et les grincheux mentionneront notamment les agressions sur les mineurs. Rappelons que cela existe aussi chez les imams et les rabbins. Alors les progressistes qui réclament l'ordonnancement des femmes et, a fortiori, le mariage des prêtes pour mettre fin à ces crimes en seront pour leurs frais. Les curés ne sont finalement que le reflet des hommes, avec leurs qualités et leurs défauts, leurs exploits et leurs horreurs. D'ailleurs, en parlant de progressisme, inutile d'attendre du nouveau Pontife qu'il se montre libéral sur le préservatif, le mariage homosexuel et j'en passe : il est nécessairement le gardien d'un dogme qui a pour but de protéger les Hommes des aléas de la société temporelle : l'Eglise reste, les modes passent. Et aujourd'hui, ces aléas sont la mondialisation, la marchandisation croissante de l'humain et le libéralisme sauvage. Après tout, même ces débauchés de Borgia ont maintenu une rigueur dans la pratique catholique. Cela ne changera pas aujourd'hui. François s'est même violemment pris le bec avec la présidente de son pays natal, Christina Kirchner, à propos du mariage gay. En revanche, soucieux du devenir des plus pauvres et des plus fragiles, il s'est montré favorable au baptême des femmes célibataires et des enfants nés hors-mariage.
Cependant, par honnêteté, il convient de faire état des reproches qui sont faits au successeur de Saint Pierre concernant son rôle supposé en faveur du pouvoir lors de la dictature militaire au pays de Maradona (1976-83). Des témoins apparaissent comme par magie, parlant de documents, de preuves irréfutables, pour établir que Jorge Bergoglio a autorisé l'arrestation de prêtres opposés au régime ainsi qu'à l'enlèvement de centaines de bébés. Soit. Mais on peut légitimement s'interroger sur la validité de ces preuves. Pourquoi ne sortent-elles que maintenant ? Pourquoi Bergoglio n'a-t-il jamais été inquiété par la justice de son pays, ni par la justice de la communauté internationale, toujours prompte à mettre son nez dans des affaires qui ne la regardent pas ? Une fois encore, en France en particulier, on oublie un peu trop souvent l'un des principes fondateurs de notre République : la présomption d'innocence. Puisque le nouveau Pape n'a jamais été mis en examen, arrêté ou condamné, il est innocent des faits qui lui sont reprochés. Point. Mais bon, vous me direz, les Français ont la nouvelle manie de soigneusement défaire tous les acquis républicains pour lesquels nombre de nos ancêtres furent massacrés. Un peu comme Pénélope. En moins sexy...
Pour conclure, évoquons un bref état des lieux de la catholicité dans le monde : l'Asie, l'Amérique et l'Afrique sont les moteurs de la chrétienté moderne. Un prélat issu de l'un de ces continents est donc chose normale. D'aucuns regretteront que le Pape ne soit pas africain : le problème, c'est que la confrontation avec l'Islam est forte sur ce continent, et que le pays qui aurait fourni un pape aurait risqué de basculer dans la guerre civile, notamment au Nigéria. D'autres regretteront, de même, qu'il ne soit pas asiatique : là encore, la prégnance d'un fort contrepoids, la Chine en l'occurrence, ne rend pas la chose aisée. La logique s'est donc tournée vers le Nouveau Monde. Tandis que l'Europe connait un recul constant parmi les croyants du Second Testament. Pourquoi ? Sans doute parce que notre terre de Cocagne nous a détournés d'un besoin constant en l'espoir que pouvait représenter la Bible. Et que notre contrée qui a vu naître tant de philosophes a tellement remis en question la pertinence des Ecritures que les Européens ont fini par s'en lasser. Enfin, les guerres de religion qui ont si souvent émaillé la Renaissance ont achevé de nous rendre sceptiques vis-à-vis d'une pratique abstraite qui exige de croire en quelque chose que l'on ne peut prouver. Logique. Imparable même. Est-ce une bonne chose ? Nul ne saurait le dire...
(1) : Pour la plus grande gloire de Dieu