jeudi 28 février 2013

Plaidoyer en faveur d'un retour au Franc

Billet de 20FF (Claude Debussy)

Bonjour à tous !

Alors que la Crise bat son plein, on ne sait plus trop à quel saint se vouer pour en sortir. La France a officiellement (et tristement !) atteint son record de 1997 en terme de chômage. Si François Hollande affirme qu'il pourra inverser la tendance de l'emploi au tournant de 2014, on a du mal à le croire. La colère monte partout en Europe, et ce ne sont pas les résultats des dernières élections générales en Italie qui pourront nous démentir. En effet, le "Non" à l'Europe et à Merkel fut cinglant de la part de Transalpins lassés par les politiques d'austérité successives imposées par Mario Monti. Un président du Conseil qui avait d'ailleurs été placé là par les marchés, et en aucun cas par le peuple. Une leçon à retenir pour l'avenir, car l'Européen en a assez que certains technocrates payés grassement et non-élus prennent des décisions iniques à leur place. On leur doit, entre autres inepties, la PAC (qui favorise les gros exploitants au détriment des petits agriculteurs qui croulent sous les dettes), le démantèlement des services publics français (vous savez maintenant pourquoi il n'y a plus de Bureau de Poste dans les villages) ou encore l'arrêt Bosman, qui a complètement dérégulé les salaires des footballeurs et pillé les meilleurs joueurs des championnats les plus faibles pour la grande joie de l'Italie, de l'Espagne et de l'Angleterre. 
Alors, on s'interroge et on cherche des solutions. L'une revient en boucle et est évoquée de plus en plus par des intellectuels de tous bords. Je parle bien sûr du retour au Franc et de la sortie de l'Euro. Emmanuel Todd, Joseph Stiglitz (Prix Nobel) et Paul Krugman (autre Prix Nobel) plaident notamment pour la fin de la Monnaie Unique. Le problème, pour les détracteurs de cette théorie, c'est la dette. Dette qui pèse aujourd'hui environ 1900 Mds €, soit 90% du PIB français. Une dette cumulée à la fois par la Gauche et la Droite depuis, surtout, 1981. A noter qu'au contraire de pays comme le Japon, 2/3 de la dette est détenue par des étrangers. Autrement dit, on peut légitimement penser que les dirigeants du pays ont endetté celui-ci bien au-delà de la capacité d'épargne des Français. Un crime pour les générations futures. Alors on pousse des cris d'orfraie en expliquant que les Français devront payer plus d'impôts. Soit. Sauf que depuis 30 ans, la dette est remboursée...par de l'endettement supplémentaire, pas par des impôts. De plus, pourquoi penser que ce serait aux plus modestes de payer l'impôt pour rembourser la dette ? A moins d'accepter l'idée, qui serait inéluctable, que les plus fortunés s'exilent fiscalement. Sans volonté politique aucune de les en empêcher. 
Un autre point à expliciter, c'est la crainte de l'inflation en cas de retour au Franc. Or, pour qu'il y ait inflation, il faut qu'il y ait une surchauffe de l'économie. Improbable en cas de substantielle hausse de la fiscalité. Quant aux taux d'intérêts élevés, qui se manifestent pour atténuer le coût de l'argent en cas d'inflation, ils sont bridés car incompatibles avec une politique de dévaluation compétitive. Politique qui est visée par les souverainistes militant pour un retour au Franc. Et puis, l'inflation est surtout le fait de l'Euro. Prenons un exemple parlant : la baguette de pain. Elle coûtait 1.25FF en 1981. 0.90€ aujourd'hui (soit environ 6FF). En se basant sur les statistiques de l'INSEE, et en cumulant l'inflation de 1982, 1983,..., 2010, la baguette devrait coûter...3.18FF !! Autrement dit, moitié moins que ce qu'elle coûte aujourd'hui. 
Soyons clairs, la volonté de revenir au Franc n'est pas, dans un premier temps, motivée par une volonté de baisser les prix. Mais de relancer la compétitivité externe. Et recommencer à vendre aux Allemands, par exemple. Ainsi, de 1980 à 2007, l'emploi industriel a chuté de 36% en France, soit 1.9M d'emplois perdus, ou encore 70.000 personnes supplémentaires au chômage par an. Un grand merci aux dirigeants français qui ont généreusement encouragé le CNPF puis le MEDEF à délocaliser tant et plus depuis 1984. 
En résumé, si l'on sortait de l'Euro pour revenir au Franc, la dette augmenterait. Ce qui est vrai. Mais avant d'en arriver là, nos dirigeants qui auraient pris cette courageuse décision se lanceraient d'abord dans une discussion multilatérale avec ses partenaires pour un retrait concerté de l'Euro. Suffisant pour que la Monnaie Unique perde de sa valeur et soit copieusement dévaluée par les marchés qui auraient alors perdu confiance en elle. Le passage de l'Euro au Franc serait ainsi moins violent, et l'augmentation de la dette serait contenue. Quitter un Euro très bas par rapport au Dollar permettrait ensuite une hausse du nouveau Mark, une aubaine pour le commerce extérieur français, qui fut, jusqu'à l'Euro, la première force de l'économie de notre pays.
Alors brisons les tabous et prenons des décisions courageuses. Autant éviter le sort de l'Irlande qui a retrouvé la croissance aujourd'hui au prix de coupes réglées dans le salaire et donc dans le pouvoir d'achat des Irlandais. Que la France retrouve sa souveraineté, et cela commence par battre sa propre monnaie !

lundi 25 février 2013

Hommage à Daniel Day-Lewis

Crédits Photo : Mario Anzuoni, Reuters

Bonjour à tous !

Une fois n'est pas coutume, il ne sera pas question ici de politique ou d'économie, mais de culture. En effet, les Césars et les Oscars avaient lieu ce week-end, l'occasion de faire un petit bilan et de rendre hommage au plus grand acteur de sa génération, Daniel Day-Lewis.
Commençons donc par les Césars. Visiblement, Antoine De Caunes n'était pas au mieux de sa forme. S'inspirer du mini-sketch de Billy Crystal consistant à s'insérer dans les scènes des films en compétition (qui date d'il y a 10 ans de cela !) n'est sans doute pas la meilleure façon de rentrer dans la soirée. En fait, c'est la profession dans son ensemble qui semblait tendue et nerveuse depuis l'affaire Maraval, qui dénonçait les émoluments des acteurs dans une tribune de presse. Autre personne à en avoir pris pour son grade à longueur de soirée, Gérard Depardieu. Il fallait s'y attendre. Pas très original. Ni très courageux de tirer sur une ambulance à plusieurs dizaines contre un seul. Kevin Costner, très ému de sa récompense du reste, s'est ennuyé ferme toute la cérémonie. Bref, rien à retenir de cette soirée, si ce n'est les justes récompenses pour Amour et De Rouille et d'os. Fort heureusement, Holy Motors de Leos Carax n'a rien reçu, et rien qu'à lire le synopsis et voir la bande annonce, ça ne donne pas envie de le voir. Tant pis si ça fait grincer des dents chez Télérama, l'Obs ou Les Inrocks. Ce sera une jubilation supplémentaire me concernant.
Et puis hier soir (enfin la nuit dernière, pour nous, en France), s'est déroulée la Cérémonie des Oscars, 85e du nom. On voit la différence. Aux USA on aime le show, quitte à en faire trop. L'hôte de la soirée, Seth McFarlane, s'est répandu en vannes de mauvais goûts, de son fait ou par l'intermédiaire de l'ours qu'il a créé, Ted. Antisémitisme, allusion à la drogue omniprésente à Hollywood, tout y est passé. Même si c'est une façon un peu maladroite de donner un coup de pied dans ce protocole aseptisé. On a quand même eu quelques moments intéressants qui auront su apporter de l'entrain à une soirée décidément trop longue, comme toutes celles du genre d'ailleurs. Adele a ainsi chanté Skyfall, Barbra Streisand lui a rendu la pareille en faisant trembler la salle avec The Way we were, en hommage aux disparus de l'année passée (Ernest Borgnine et Michael Clarke Duncan pour ne citer qu'eux). Jennifer Lawrence, Oscar de la meilleure actrice, est tombée et Michelle Obama, en duplex de la Maison Blanche, a consacré Argo meilleur film. De quoi faire oublier quelque peu les récompenses de mauvais goût attribuées aux Misérables, énième itération du genre qui doit faire regretter à Hugo d'avoir écrit ce livre, de là où il nous regarde. Quant à l'Oscar du meilleur réalisateur pour Ang Lee, je veux bien, mais il ne faut pas oublier que son film - sans vouloir lui retirer ses qualités - a été tourné à 75% sur fond vert, sans dialogues ou presque et avec très peu de jeu d'acteur à diriger. A ce moment-là, autant récompenser la météo de Nathalie Rihouet. Michael Haneke est reparti, sans surprise, avec la statuette du meilleur film étranger. On aurait aimé qu'il en fût de même pour Emmanuelle Riva d'autant que la concurrence n'était pas exceptionnelle cette année. On appréciera, enfin, que Bigelow ne reparte sans aucune statuette principale, parce que nous faire le coup de Démineurs 2, faut pas exagérer. Jessica Chastain aura, quant à elle, d'autres occasions de remporter une récompense.
Enfin, il y eut, pour moi, le moment fort de la soirée. Fort parce qu'historique. Nicholson a, par le passé, il est vrai, remporté 3 Oscars, dont deux comme meilleur second rôle. Mais voilà, Daniel Day-Lewis a fait mieux hier soir. 3 Oscars du meilleur acteur, cela n'était jamais arrivé. Sur trois décennies différentes en prime. Il remporte sa première récompense en 1990 pour My left foot, de Jim Sheridan, enchaîne en 2008 pour There will be blood de Paul Thomas Anderson et enfin cette année pour Lincoln. Cet acteur a tourné pour quelques-uns des plus grands cinéastes (Stephane Frears, James Ivory, Michael Mann, Martin Scorsese, Paul Thomas Anderson et bien sûr, donc, Spielberg. En 1998, il avait pourtant décidé de prendre sa retraite, s'installant comme cordonnier. C'est Scorsese qui avait été le chercher pour lui offrir un rôle dans Gangs of New York. Bien lui en avait pris. Car on ne saurait se passer du talent d'un acteur qui interprète ses rôles à l'ancienne, en s'en imprégnant jusqu'à la moelle. Sur le tournage de Lincoln, tout le monde était prié de l'appeler "Mister President", y compris entre les scènes. Il échangeait par SMS en langage du XIXe siècle avec ses partenaires de jeu et avait été jusqu'à reproduire les inflexions et la démarche de celui que les Américains surnomment affectueusement Abe. Les critiques de cinéma ont unanimement loué son talent d'acteur depuis qu'il hante les plateaux de tournage (son premier film date de 1971, il avait alors 14 ans.) Lui qui confie toujours ressentir une immense tristesse et un grand vide à la fin de chaque tournage, tant il y met de l'intensité et de l'authenticité, pourrait bien nous faire le même effet le jour où il arrêtera définitivement. See you soon, Daniel !