lundi 31 mars 2014

2e tour des Municipales : Very Bad Trip

François Hollande très inquiet
Crédits Photo : Bob Edme/AP/LeMonde.fr

Bonjour à tous !

Ils savaient qu'ils allaient perdre, mais ils ne se doutaient pas que ce serait dans de telles proportions : aujourd'hui, la Gauche de Gouvernement a perdu dans les grandes largeurs les élections municipales, du jamais vu dans de telles proportions depuis les Municipales (encore !) de 1983, celles qui suivirent le désormais fameux "tournant de la rigueur" du tandem Mitterrand-Mauroy.

La malédiction des élections intermédiaires

C'est un fait, depuis une bonne trentaine d'années, le parti en charge des responsabilités au niveau national encaisse défaite sur défaite lors des élections dites intermédiaires. On se souvient, donc, des Municipales de 1983, mais aussi de celles de 2001 préfigurant d'un scrutin présidentiel de 2002 difficile pour le PS et masquées par les conquêtes de Lyon et Paris, mais aussi des Municipales de 2008 sanctionnant durement la politique sarkozyste, de même que les Régionales de 2004, qui étaient une punition envers le chiraquisme. Rien de nouveau donc, hormis trois choses : l'abstention massive, qui en fait le premier parti de France et qui marque une défiance à l'égard de nos élus qui ne représentent plus rien et qui n'ont plus de pouvoir réel ; le retour du FN dans certaines mairies et enfin la disparition de la Gauche dans les villes de petite et moyenne importance, ce que l'on appelle aujourd'hui le péri-urbain.

Christophe Guilly avait raison

Pour ceux qui ne le connaîtraient pas encore, il s'agit d'un géographe social qui s'est intéressé, depuis 15 ans, aux classes populaires et qui, par extension, a effectué un travail de fourmi sur la carte électorale. Et il a observé que les grandes métropoles et les villes mondialisées restent l'apanage de la Gauche-"bobo" et d'une Droite "molle" (l'exemple typique de Juppé à Bordeaux) tandis que les villes de moindre importance, situées dans le péri-urbain et subissant de plein fouet déclassement, fermetures d'usine, insécurité votaient UMP et FN, avec de plus en plus d'entrain et de moins en moins par rejet de la classe politique pour ce qui concerne le parti de Marine Le Pen. A force d'avoir érigé l'Europe et la mondialisation en religion, les élites dirigeantes des deux principaux partis de Gouvernement en ont perdu le sens des réalités. Aujourd'hui, d'après Guilluy, 60% de la population française vit dans cette France péri-urbaine qui se paupérise grandement. Autre symbole, la victoire de Fabien Engelmann à Hayange, commune où se situent les hauts-fourneaux de Florange. Le nouvel édile est un ancien cégétiste qui s'est encarté FN lorsqu'il a compris que Droite et Gauche servaient invariablement la même soupe en provenance de Bruxelles. Les faits sont désormais établis, il n'est plus temps de se voiler la face : la Gauche a perdu 155 villes de plus de 9000 habitants, la renvoyant cruellement face à ce que les Français ne veulent plus : un clientélisme avéré auprès de nébuleuses associatives encourageant le communautarisme qui a fait la gloire du socialisme municipal depuis 30 ans et soigneusement élaboré par Julien Dray, notamment.

Que peut faire Hollande ?

Le Président peut remanier : pas très heureux à quelques semaines des élections Européennes qui s'annoncent comme un nouveau chemin de croix pour le PS (donné 3e derrière le FN, 1e, et l'UMP, 2e). Il devrait alors remanier à nouveau. De quoi occuper les médias qui fonceraient alors tête baissée dans le petit jeu des pronostics au lieu de se préoccuper de la politique menée par le Gouvernement qui serait pourtant la même. On voit en effet mal Hollande mettre en péril son orthodoxie européenne et renoncer au Pacte de Stabilité signé en début de Quinquennat avec Merkel, ou au Pacte de Responsabilité avec ses nouveaux amis du MEDEF. En vérité, peu importe les hommes, Hollande a une idée en tête et n'y renoncera pas, quitte à perdre en 2017. Mais l'homme est malin et fait en sorte de renvoyer l'opposition dans les cordes, entretenant savamment la montée du FN afin de se retrouver en duel avec Marine Le Pen, sans doute sa seule chance de renouveler son bail Faubourg Saint-Honoré.

En définitive, le peuple a parlé, clairement, donnant raison aux différents sonneurs de tocsin qui s'alarment du fossé grandissant entre une France d'en haut, vivant dans de grandes métropoles et qui a la mondialisation heureuse, et une France d'en bas, majoritaire, qui vit dans les campagnes et les petites villes et qui subit de plein fouet les conséquences désastreuses d'une ouverture des frontières sauvage et sans contrôle. Il semblerait que l'écart entre les deux parties s'agrandisse dangereusement et il serait donc grand temps qu'un arbitre vienne siffler la fin du match avant que les débats ne deviennent houleux au point que plus aucun retour en arrière ne soit possible.