Jean-François Copé/Crédits photo :
François Bouchon, le Figaro
Bonjour à tous !
Alors que le feu des projecteurs est braqué sur la politique menée par le binôme Hollande/Ayrault, l'UMP mange son pain noir dans l'opposition. Il redécouvre celle-ci, dix ans après l'avoir quittée.
Décapité par la retraite anticipée de son leader naturel, Nicolas Sarkozy, le parti donne l'impression de courir comme un poulet sans tête.
A peine les élections terminées - et perdues - et déjà les langues se déliaient, critiquant, flagellant, distribuant bons et mauvais points. Tel un navire en train de couler, chacun essaie tant bien que mal de sauver sa peau. L'union sacrée qui avait prévalu pendant cinq ans a brusquement volé en éclats.
Le soir de la défaite aux Législatives, le sage Alain Juppé, qui passe pour le cerveau de la bande, appelait tant bien que mal à faire front ensemble et à ce que chacun fasse son autocritique.
Las, Baroin, Pécresse et surtout l'opportuniste Kociusko-Morizet tiraient à boulets rouges sur le virage trop "droitier" pris par le président-candidat Sarkozy et son éminence grise, Patrick Buisson.
Quant à Roselyne Bachelot, elle publiait A feu et à sang : Carnets secrets d'une présidentielle de tous les dangers (1) qui critiquait ouvertement la campagne de Nicolas Sarkozy.
Au sommet de la hiérarchie, Copé et Fillon, qui ne peuvent pas se sentir, commençaient déjà à poser leurs jalons tandis que Bertrand se frottait les mains en attendant de récupérer les morceaux. Juppé jouait les pompiers de service et Le Maire se découvrait des ambitions, se déclarant plus européiste que jamais !
Quid des préoccupations de l'électorat dans tout cela ? Elles furent, et sont toujours, oubliées. La querelle des égos prime sur le reste. Comme le PS pendant dix, l'UMP se transforme en cour de récré plutôt que de travailler sur de nouvelles idées, un nouveau programme. Pire que tout, il oublie l'histoire de la droite française en proposant, pour 2017, de recourir à des primaires démagogiques comme le PS. Alors que la droite avait jusque alors toujours privilégié le chef et non le parti, ayant parfaitement intégré les exigences de la Ve République, sorte de monarchie républicaine.
Parmi toutes les personnes citées, faisons un tri : Le Maire et Baroin sont d'ores et déjà à ranger aux oubliettes : pas d'idées, ou de mauvaises idées, sur l'Europe, l'Europe et encore l'Europe. Et je ne parle pas du bilan extrêmement médiocre de Baroin à Bercy. NKM qui crache sur la campagne de Sarkozy alors que c'est lui qui l'a faite, et alors qu'il en avait fait sa porte-parole de campagne montre là qu'elle n'est rien d'autre qu'une opportuniste, une girouette qui parle selon le sens du vent. Sa façon de se revendiquer de la droite humaniste est par ailleurs outrecuidant et insupportable. Au nom de quoi est-elle humaniste ? Qui est elle pour dire qui est humaniste et qui ne l'est pas ? Une cure d'introspection personnelle serait la bienvenue pour l'édile de Longjumeau.
Pour les trois leaders naturels du parti, la donne est différente : Juppé ne sera jamais apprécié par les Français, ses liens encore forts avec feue la chiraquie plaident contre lui. Il a d'ailleurs été condamné à cause de ces derniers. Copé est un communiquant, certes, un tacticien hors pair mais surtout un insupportable libéral qui est prêt à tout pour conserver la primauté du libéralisme sur le peuple. Quitte à déréglementer le marché du travail, à faire du dimanche un jour de travail comme un autre, etc.
Reste Fillon. Il était bien parti dans sa carrière politique, proche de Philippe Séguin, dont il semblait alors partager les idées gaullistes et souverainistes. Mais, avec le temps et la marginalisation de son ancien mentor, il s'est lui aussi rapproché des idées libérales et européistes, idées pro-UDF plutôt que pro-RPR.
Pour démêler ce micmac, un petit retour sur l'histoire politique récente s'impose : le RPR était un parti à vocation résolument gaulliste, républicaine, sociale, opposée à un libéralisme échevelé, attachée à une certaine souveraineté nationale et opposée à une immigration incontrôlée qui mettrait à mal l'équilibre fragile du pacte républicain. L'UDF, lui, était un parti résolument pro-européen, qui faisait de Jean Monnet et Robert Schumann les nouveaux héros de l'Histoire Contemporaine. Résolument libéral, il faisait le pari d'une puissante intégration européenne pour tirer vers le haut l'ensemble des pays du Vieux Continent. Les deux partis constituaient l'essentiel de la droite française. Et lorsque les deux partis s'alliaient, le panier de la mariée était alors souvent copieusement garni car comme le disait alors Charles Pasqua "L'UDF apporte les élus et le RPR apporte les électeurs".
Donc, lorsque l'on accuse Patrick Buisson et Nicolas Sarkozy d'avoir opté pour un virage soi-disant droitier dans la campagne pour la Présidentielle, on va trop vite en besogne, beaucoup trop vite : ce n'était rien d'autre qu'un retour aux fondamentaux du RPR, avec une forte inspiration puisée dans le programme du RPR de 1988. Or, on a constaté longtemps, pendant la campagne, que Sarkozy n'était pas supposé franchir le premier tour et que si il y parvenait, il devait perdre d'au moins 10 points. Finalement, il a échoué à moins de 2 points de François Hollande. Et il aurait pu gagner si il avait montré une vraie détermination gaulliste pendant ses cinq ans à l'Elysée : au lieu de cela, on a eu une immigration légale qui n'a jamais été aussi importante, des accords d'austérité conclus avec Merkel et un interventionnisme trop prononcé à l'étranger, comme lors de la crise libyenne, au détriment de la Realpolitik.
Quand en plus on constate que la hiérarchie de l'UMP ignore sciemment les appels de ses partisans à entamer des discussions avec le FN, signifiant par là l'envie désespéré d'un électorat en mal de conscience nationale et de respect des principes de la République, on se dit que l'opposition est loin d'avoir compris ce qu'il lui faudrait faire pour regagner la confiance de l'électorat. Un électorat qui ne supporte plus la tolérance envers les minorités, qui ne supporte plus que les patrons fassent la loi et délocalisent toujours plus vers les pays moins-disants en terme de social et de fiscalité (sacrifiant toujours plus l'industrie française et notre commerce extérieur) et qui n'en peut plus de devoir obéir à Bruxelles et non à Paris.
Dernièrement, Nicolas Sarkozy a effectué une sortie médiatique critiquant l'immobilisme de Hollande concernant le dossier syrien : à en juger par ce dernier fait, on se dit qu'il reste encore énormément de travail avant que l'UMP ne retrouve ses esprits, son électorat et le pouvoir !