Bonjour à tous !
Cela ne vous aura pas échappé, François Bayrou, et le MoDem, parti qu'il dirige, ont encaissé une sévère défaite aux Présidentielles ainsi qu'aux Législatives. Bayrou, l'homme qui se rêvait à l'Elysée, a failli. Il a perdu son siège de député dans son fief du Béarn. Aujourd'hui il n'est plus rien, et on peut considérer, sans trop s'avancer, que sa carrière politique est derrière lui.
La question est de savoir comment un homme qui a fait plus de 18% au premier tour de la Présidentielle en 2007, ouvertement dragué par la candidate socialiste qualifiée pour le second tour, Ségolène Royal, a pu tomber si bas.
Examinons les faits. D'abord, Bayrou est un homme qui agit seul. Il n'aime pas déléguer et s'est toujours rêvé un destin de sauveur de la patrie, à la façon d'un Général de Gaulle qu'il admire tant (il cite souvent le Conseil National de la Résistance de 1943 comme fondement de son idéologie). L'homme est agréable, intelligent, cultivé, sans doute le plus lettré de sa génération. Il est la personnalité politique des Français. Mais les Français ne sont pas dupes : ils ont cerné l'arrogance du personnage, qui s'estime trop bon pour se plonger dans la nasse de la vulgate politique. Résultat, en 2007, quand Royal fait le pied de grue devant chez lui pour lui proposer Matignon en cas de victoire, il lui oppose une porte close. Quelle ne fut pas son erreur ! Non seulement son parti s'est vu isolé plus que jamais après la victoire de Sarkozy (ses anciens amis du Nouveau Centre et du Parti Radical n'ont pas cessé de le rappeler à l'ordre), mais en plus les Législatives qui suivirent furent, déjà à l'époque, une catastrophe. Il aurait pu alors, il aurait dû, même, accepter la main tendue de Royal et faire exploser le PS : les socio-démocrates et les réalistes tels Valls auraient suivi le mouvement tandis que les plus radicaux, (Aubry ou Hamon), se seraient retrouvé isolés dans une Gauche plus proche du Parti Communiste et incapable de gouverner puisque celui-ci ne fait plus recette.
Lorsqu'il prit le contrôle de feu l'UDF, Bayrou était alors à la tête d'un parti qui comptait quelques cent députés : aujourd'hui il n'en reste plus que deux. Et il ne fait pas parti du lot. Son entêtement à vouloir se croire plus malin que tout le monde et sa croyance en un monde politique au-delà des clivages ont eu raison de sa détermination. Car la politique, quoi qu'on en dise aujourd'hui, c'est d'abord une opposition intellectuelle et méthodologique. Le monde politique, la démocratie, vivent de l'opposition, de l'affrontement. C'est d'ailleurs pour cela que l'électorat centriste n'existe plus en France. Les citoyens de ce pays ont compris qu'il fallait faire un choix : et ce choix, ils l'ont fait sans lui. Cette année, le FN a récolté 17% aux Présidentielles, 13.5 aux Législatives. Et pourquoi ? Parce que c'est le seul parti, n'en déplaise à certains, qui parle de souveraineté nationale, de sortie de l'Euro et de valeurs, notamment en matière de criminalité. Tout le contraire du MoDem, parti ouvertement pro-européen, militant d'ailleurs pour un fédéralisme accru avec des transferts de souveraineté encore plus massifs vers Bruxelles (comprendre Berlin). Et cela, les Français n'en veulent pas, n'en veulent plus. Ils tiennent à leur pays. Et ils ont compris que cette Union Européenne toujours plus libérale faisait le jeu des multinationales qui délocalisent leurs emplois à l'envi. Le jour où Bayrou, et les autres tenants d'une Union Européenne qu'il faut maintenir à tout crin en dépit du bon sens (cf l'exemple grec), auront compris cela, alors peut-être que nous pourrons envisager une sortie de crise durable avec une politique à long terme cohérente.
Le plus cruel dans ce châtiment électoral infligé à François Bayrou, c'est qu'en deux jours et quelques coups de téléphone, Jean-Louis Borloo a réussi l'exploit de constituer un groupe parlementaire au sein de l'Assemblée Nationale avec les différentes factions centristes. Sans doute le coup fatal pour François Bayrou. Le Centre s'invente une deuxième vie artificielle, son plus fervent animateur ne peut que rester à quai, et regarder le train partir, sans lui.
Crédits photo : Christophe PETIT TESSON/MaxPPP