vendredi 21 novembre 2014

Ecole : stop au massacre !

Crédits : Ouest France/Google Pictures

Bonjour à tous !

C'est vrai, la caricature date un peu, mais elle est toujours, malheureusement d'actualité, et n'est que l'un des trop nombreux symptômes d'une école en crise qui, désormais, sombre en plus dans le ridicule. Explications.

Profs non-payés, postes non-pourvus

En 2012, "Moi, Président", encore en campagne, avait promis 60 000 postes d'enseignants en plus. Il est vrai que les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent, comme le veut le vieil adage politique, mais là, on est quand même en droit de crier au foutage de gueule. Les différentes enquêtes menées, y compris par des médias "De Gôche", montrent bien qu'on est loin du compte. Il est vrai que la France compte un net surplus de fonctionnaires, mais ce n'est pas tant dans la fonction publique d'Etat (polices, pompiers, hôpitaux, éducation, justice, armée) qu'il faudrait retrancher mais plutôt la grassouillette fonction publique territoriale. Or, depuis les premières lois de décentralisation de 1982, les "couches du mille-feuilles" s'additionnent, se superposent, s'ajoutent : communautés de communes, départements, régions et j'en passe, avec multiplication de postes doublons et construction de somptueux bâtiments pour loger tout ce beau petit monde. Georges Frèche en fut l'exemple le plus caricatural. Et pourtant, il suffisait de s'en tenir aux préfectures et aux départements pour que le découpage territorial de la France conservât sa justesse et une égalité de traitement de chaque citoyen devant l'Etat. Le seul souci, c'est que l'Etat en question s'en lave les mains façon Pilate (Ponce, hein, pas le cours de sport) et se défausse toujours un peu plus de ses responsabilités, préférant déléguer ses pouvoirs à des notables locaux qui font circuler les valises de billets et le clientélisme plein pot. Huchon et Guérini illustrent parfaitement ce phénomène, même s'ils ne sont pas les seuls. Nous voici revenus au temps des seigneurs du Moyen-Âge où Hugues Capet, élu Roi de France en 987, se retrouva fort dépourvu devant des roitelets bien plus puissants que lui et aux terres bien plus vastes que les siennes. Il fallut attendre, au moins, Louis XIV, pour que la France prenne enfin la forme d'un pays cohérent, puissant et uni. 
Pour en revenir à nos moutons, c'est donc l'accroissement exponentiel de la fonction publique territoriale qui sert de paravent à l'Etat pour faire des économies dans la fonction publique nationale, la seule vraiment utile, voire indispensable. Les hôpitaux fonctionnent en flux tendu, les casernes militaires ferment les unes après les autres, de même que les tribunaux, les flics roulent avec un parc de véhicules datant de la présidence de Chirac et nos chères têtes blondes se retrouvent de plus en plus souvent devant une estrade vide dans leur salle de classe. L'ignoble est atteint lorsque l'on apprend, horrifié, que les dernières recrues en Seine-Saint-Denis révèlent devoir quémander des bons alimentaires car elles n'ont pas encore été payées depuis la rentrée scolaire. L'Etat est réputé être le plus mauvais payeur qui soit, tout entrepreneur vous le dira. Mais là, on frise la comparaison avec n'importe quelle république bananière d'Afrique ! Enseigner dans le "9-3" n'est déjà pas une sinécure, mais quand en plus on n'est pas payé pour accomplir ce sacerdoce, il y a de quoi avoir la moutarde et autres épices qui nous montent au nez ! 
Enfin, par magnanimité, je préfère taire un autre scandale dont on ne parle jamais, qui est celui de l'accompagnement des enfants handicapés ou en situation de grand échec scolaire. Ces enfants nécessitent le recours à un AVS (1), mais leur recrutement est erratique, digne d'un tirage à la tombola et leurs conditions de travail sont précaires car leur situation contractuelle relève de l'équilibrisme.

L'Ecole, cheval de Troie de toutes les idéologies les plus farfelues

Comme si ça ne suffisait pas, et alors qu'il est évident que le niveau des enfants baisse dramatiquement dans la maîtrise des fondamentaux, le ministère fait feu de tout bois pour se servir de nos chérubins comme rats de laboratoire pour toutes les idéologies les plus improbables qui soient. Vous avez aimé la théorie du genre et le scandale de la ligne Azur (désavouée depuis, fort heureusement, par le Conseil d'Etat, pour avoir notamment fait l'apologie de la consommation de stupéfiants) ? Vous allez adorer la suppression des notes. Avec, dans le rôle principal, Najat Vallaud-Belkacem, encore et toujours elle. Sous vos applaudissements ! Non contente d'avoir fait fonctionner à plein le népotisme en plaçant son cher et tendre dans les pattes présidentielles en tant que conseiller à l'Elysée, elle laisse largement entendre aujourd'hui que la suppression des notes "stigmatisantes" et "traumatisantes" serait une riche idée pour éviter que les gosses ne sortent traumatisés d'une mauvaise note. Ben voyons ! A part faire plaisir à Marcel Rufo et à la proportion toujours (tristement) croissante de parents qui délèguent complètement l'éducation de leur rejeton à l'instituteur (cf le dessin d'illustration en haut de page), il s'agit bien là d'une catastrophe en puissance. Il est évident que la notation est imparfaite, mais il s'agit d'humains notant d'autres humains, la seule différence étant que les premiers ont accompli quelques années d'études et réussi au moins un concours avant d'avoir ce statut lourd en responsabilités. La note a au moins le mérite de situer l'enfant dans son travail, de lui donner une mesure assez précise du chemin qu'il lui reste à parcourir pour atteindre l'excellence. Il est évident qu'une note donnée sèchement ne saurait être acceptable, tandis que l'accompagner de commentaires précis et circonstanciés lui donne immédiatement un caractère plus justifié.
Mais alors par quoi la remplacer ? Par des....pastilles de couleur ! J'imagine déjà un prof agrégé de maths s'amuser à mettre des gommettes sur des copies d'élèves de Terminale. Fantastique... Mais le nombre et la couleur desdites gommettes marqueront, elles aussi, le degré de réussite ou d'échec de l'élève. Simplement, l'échelle d'appréciation sera plus floue tandis que le barème sera incompréhensible à souhait, comme l'aiment les idiots qui pondent nos programmes et s'engraissent sur la Bête depuis des années à l'Hôtel de Rochechouart, dans le très cossu VIIe arrondissement. 
Franchement, il est temps d'en finir avec ces inepties et d'en revenir, comme je l'avais évoqué autrefois dans un post précédent, à une Instruction Publique sensée, réfléchie, avec des programmes simples et cohérents qui permettent à tous les élèves de démarrer sur un pied d'égalité dans la vie en maîtrisant tout à la fois l'écriture, la lecture et le calcul à la sortie de l'école primaire. Quant aux problèmes d'éducation, qu'on les renvoie à ceux dont c'est la tâche initiale, le devoir primordial : les parents. Dur dur, quand les deux travaillent en même temps et qu'ils font des enfants pour "faire bien" socialement parlant, comme c'est le cas de tous ceux qui capitulent devant leurs enfants-rois, mal élevés et gavés d'écrans jusqu'à plus soif... Enfin, c'est une autre discussion. Mais pour que le bon sens revienne,  il faudrait que notre ministre cesse de "chercher à faire parler d'elle" comme le notait si judicieusement Jean-Paul Brighelli (2) sur l'antenne de RTL il y a quelques jours de cela...


(1) AVS = Auxiliaire de Vie Scolaire. Adulte accompagnant spécifiquement un enfant en détresse scolaire ou handicapé dans ses tâches liées à l'école
(2) Jean-Paul Brighelli est un professeur agrégé de Lettres Modernes, chroniqueur pour Le Point et Causeur, qui héberge son blog Bonnet d'Âne. Il milite de longue date pour un retour aux fondamentaux au sein de l'école et pour des moyens d'envergure dans une institution aujourd'hui sinistrée