Alors qu'en France la question se pose autour du budget de la Défense pour le quinquennat 2014-2019, le monde regarde avec circonspection le jeune Kim Jong-un jouer au généralissime en Corée du Nord.
Rappelons que la péninsule coréenne est divisée en deux depuis 1953 et la fin de la Guerre de Corée. La Corée du Nord de Kim Il-Sung avait alors choisi la voix du communisme de sa grande soeur chinoise, alors dirigée par Mao. La Corée du Sud, quant à elle, s'était tournée vers l'Occident et l'Oncle Sam. Les deux pays sont séparés par une zone démilitarisée...surveillée par 1 million de soldats !!!
La Corée du Nord est dirigée selon la doctrine du Juche, qui prône une société sans classes, reposant sur l'indépendance politique, l'auto-suffisance économique et l'autonomie militaire. Evidemment, cela s'est rapidement transformé en une cruelle autocratie où la plupart des Nords-Coréens meurent de faim et où seuls l'armée et les dignitaires du Parti vivent décemment.
Depuis que Kim Jong-un a succédé à son père, Kim Jong-Il, en fin dernière, celui-ci cherche à imposer son autorité. En effet, son jeune âge et le fait d'avoir passé une bonne partie de son enfance à l'étranger suscitent la méfiance de la part des têtes pensantes du pays.
Le hasard étant ce qu'il est, la Corée du Sud a changé de dirigeant il y a quelques semaines avec l'arrivée de sa nouvelle présidente, Park Geun-hye. Ajoutons à cela la réélection d'Obama et voilà l'occasion rêvée pour le dictateur en herbe de faire des effets de manche et de rouler des mécaniques. Le téléphone rouge entre Pyongyang et Séoul a été coupé, le peuple a été prié de venir manifester contre "l'impérialisme américain", et le moindre prétexte suffit à faire monter la tension d'un cran.
La question est de savoir si les Nord-Coréens passeront à l'action. Et, fort heureusement, le doute est permis. D'abord parce que la Russie, qui a toujours son mot à dire dans la région, est contre. Ensuite parce que la Chine a déjà assez à faire avec le Japon concernant les Îles Shenkaku et que l'Empire du Milieu traînera sûrement des pieds pour aider son petit et remuant voisin. En outre, il semble que le pays soit en manque de missiles de croisière intercontinentaux : dans ces conditions, frapper Guam ou Hawaii pour mettre à mal les positions américaines dans la région, comme cela est évoqué à Pyongyang, paraît technologiquement improbable. Toutefois, les missiles balistiques Scud stockés au Nord du 38e parallèle ont de quoi faire souffrir les Japonais, eux aussi régulièrement dans le viseur de cette monarchie stalinienne.
Enfin, il reste deux raisons essentielles pour lesquelles il y a peu de chances de voir la situation dégénérer : la première, c'est que si Kim est doté d'un minimum de bon sens, il sait qu'emmener son pays à la guerre équivaudrait à un suicide. Car il n'a aucun espoir de gagner, quand bien même il disposerait de l'arme nucléaire. Et la seconde, c'est qu'il risquerait de voir ses soldats, souvent mal nourris et sûrement peu ou pas payés, faire défection, le ridiculisant aux yeux du monde entier. Impensable pour ce genre d'homme à l'ego sur-dimensionné. Mais cela aurait le mérite, au moins, d'éviter un bain de sang.
Cependant, il ne faut pas perdre de vue que Kim est un facteur X. Comme son père et son grand-père avant lui. Ce n'est pas la première fois, depuis 60 ans, que la tension s'accroît d'un coup entre le Nord et le Sud de la Péninsule coréenne. Il se pourrait, malheureusement, qu'un jour cela soit la fois de trop. Il n'y a donc plus qu'à espérer que Kim garde la tête froide. Même si, paradoxalement, cela maintient de facto son peuple dans la misère et le dénuement...