vendredi 25 janvier 2013

Libéralisme : quand l'Europe souhaite se tirer une balle dans le pied

D. Cameron & A. Merkel à Davos
Crédits Photo : BPA/Reuters

Bonjour à tous !

Vous n'êtes pas sans ignorer, pour avoir tous vécu cela à un moment ou à un autre de votre vie, que, lorsque vous êtes malade, le médecin vous recommande de rester bien au chaud chez vous. Le but est d'éviter de contaminer les autres mais aussi d'éviter de prendre un coup de froid qui viendrait aggraver le mal dont vous souffrez déjà.
Quand on traduit cette pratique de bon sens en langage économique, il faut comprendre : la crise vous a plus touché qu'un autre, instaurez une dose de protectionnisme histoire de protéger la force vive de votre économie : votre industrie ! Celle-la même qui, lorsqu'elle est compétitive par ses innovations et la qualité de sa main d'oeuvre, assure à tous les coups des rentrées de devises fraîches et une croissance solide. Et c'est encore plus vrai dans un monde ouvert aux quatre vents comme aujourd'hui. Tellement ouvert que notre cher pays est devenu le refuge privilégié de malades atteints de la forme la plus grave de la tuberculose en provenance du grand Caucase russe, soit dit en passant.
Alors que la crise a largement démontré que le monde de la finance était largement responsable de cette catastrophe économique, sociale et humaine, alors, justement, que le monde de la finance n'est que la forme la plus perfide, parce que la plus dématérialisée du capitalisme, de la mondialisation et du libéralisme échevelé, Angela Merkel vient de décréter qu'il s'agissait là du remède miracle ! Eh oui, vous avez bien lu.
Désireuse de connaître les raisons exactes du questionnement existentiel britannique quant à son futur au sein de l'Union Européenne, notre chère Angie, jamais avare d'un sale coup, s'est entretenue avec son homologue insulaire, David Cameron. Celui-ci a plaidé, ô surprise quand on connaît le bonhomme, l'orientation de son parti et même l'inclination de son pays, à plus de libéralisme. Sans ciller outre mesure, la Terminator de l'Europe du Sud a aussitôt déclaré qu'il conviendrait en effet de faire baisser les dépenses sociales de l'ensemble de l'Union et de conclure des accords de libre-échange privilégiés avec le Japon, l'ensemble des pays de l'ASEAN (sorte de marché commun de l'Asie-Pacifique), le Canada et, rêve suprême, l'Oncle Sam. 
Autant injecter le virus H1N1 à un malade de la grippe. Ces inconscients semblent pourtant oublier que l'Histoire n'est qu'un éternel recommencement et qu'il y a environ 30 ans, lorsque les premières failles apparurent dans l'Empire soviétique, le Politburo s'était empressé de réclamer encore et toujours plus de communisme. On sait ce qu'il en est advenu finalement. 
L'Allemagne se croit autorisée à parler au nom de toute l'Union, suscitant la joie des très libéraux pays du Nord, y compris ceux qui sont encore un genou à terre comme l'Irlande. Le Danemark s'est empressé de rejoindre cette troupe de joyeux drilles. Pourtant Mme Merkel devrait lire Spiderman plus souvent. On y apprend que : "Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités." Elle devrait donc, plutôt qu'opérer cette sorte de fuite en avant égoïste et irresponsable, chercher à comprendre d'où vient le mal profond dont souffre l'Europe. Et commencer par instaurer un véritable protectionnisme européen, en attendant que les pays qui n'en peuvent plus finissent par l'appliquer à l'échelon national.
Il est plus que temps que ces messieurs-dames qui gouvernent avec des oeillères se penchent sur le bas-peuple. Sinon un vent populiste soufflera sur les prochaines élections. Et il sera trop tard pour venir se plaindre. D'autant que les électeurs ne seront plus dupes du : "C'est pas notre faute, ce sont ces démagos de populistes qui jouent aux incendiaires !"
Lui qui rêvait des Etats-Unis d'Europe, je n'ose penser à la réaction de Victor Hugo si il voyait son rêve devenu réalité dans la peine, la souffrance et la paupérisation des masses.

mardi 22 janvier 2013

Renault, l'entreprise qui déchaîne les passions

Louis Renault en 1926/Crédits Photo : Wikicommons

Bonjour à tous !

C'est tombé cette semaine, Renault va supprimer 7500 postes en France. Il n'y aura aucun licenciement sec ni départ volontaire a assuré la direction du groupe, mais plutôt des non-remplacements de départ à la retraite. Et l'on attend ici avec amusement que M. Montebourg se manifeste. L'attente risque d'être longue. Car il est plus facile de taper sur PSA, entreprise essentiellement française et qui possède la majeure partie de ses usines dans l'Hexagone : un non-sens économique dans la compétition entre constructeurs automobiles, mais une pratique vertueuse - à saluer - de patriotisme économique. Tout le contraire de sa rivale historique dirigée par l'international Carlos Ghosn. Le cost killer, comme on l'appelle, ne transige pas : on s'aligne sur les petits voisins d'à côté concernant les conditions de travail ou on délocalise. Tout le charme de la mondialisation chère à tous nos amis européistes, de quelque bord qu'ils soient. Ils se reconnaitront. Notre ministre de la désindustrialisation progressive (et surtout agressive d'ailleurs...) sait pertinemment qu'il est inutile de s'en prendre à Renault : d'abord parce que l'entreprise est totalement internationalisée et que Ghosn s'en moquerait comme de son premier jeu de boutons de manchettes, et ensuite parce que l'Etat est actionnaire à 15%. Si il prenait la parole, cela mettrait en fâcheuse posture notre fabuleux trio Hollande-Ayrault-Moscovici !
Et puisqu'on parle de la participation de l'Etat dans la marque au Losange, il est bon de faire un petit récapitulatif historique de la façon dont cela s'est produit. C'est donc Louis Renault qui a fondé l'entreprise avec ses frères en 1899. L'usine historique se trouvait à Billancourt. Malheureusement, il se révéla être un patron sans pitié avec ses employés, licenciant sans ménagement ceux d'entre eux qui étaient syndiqués. Cela prit des proportions dramatiques en 1938 : d'abord bloquée par les militants CGT et communistes, l'usine est évacuée par les forces de l'ordre manu militari. Il faut dire que la police de l'époque ferait passer celle d'aujourd'hui pour une escouade de boy-scouts ! Après cet éclat, tous les délégués du personnel et la plupart des ouvriers syndiqués furent renvoyés et Renault s'arrangea même pour qu'ils ne trouvent pas de travail ailleurs dans la région !
1945, fin de la Guerre. Nombreuses furent les entreprises françaises à avoir collaboré, bon gré mal gré, avec les Nazis : Renault, mais aussi Peugeot et Citroën. Une seule va payer les pots cassés. Car, alors qu'ils avaient commencé la Guerre dans le camp des collabos et des antisémites de premier ordre, les Communistes ont, entretemps, tourné casaque et font même partie du Gouvernement à la Libération. L'occasion est trop belle de se débarrasser du cruel Louis Renault. Ni une, ni deux, l'entreprise est nationalisée. L'entrepreneur ne s'en remettra jamais et mourra en 1946. Il y a une haine si viscérale envers lui qu'aujourd'hui encore les leaders syndicaux de l'entreprise veillent à ce que son portrait ne figure même pas dans la salle du conseil d'administration ! 
Que les Communistes aient voulu se venger d'un être si brutal et si veule, cela peut se comprendre aisément. Mais il aurait été préférable de le dire honnêtement plutôt que d'essayer de nous livrer une vision tronquée de l'Histoire où seule l'entreprise Renault aurait collaboré avec l'ennemi. C'est décidément une sale manie de la Gauche que de nous livrer une version de l'Histoire tiédasse à sa sauce. Il en va de même pour son rôle dans la colonisation et pendant la Seconde Guerre Mondiale, comme je l'ai mentionné plus haut. Cet exemple parlant d'une entreprise emblématique française qui se retrouve être au centre d'enjeux politiques nationaux nous montre qu'il ne faut jamais hésiter à questionner l'Histoire. Même si ce que l'on trouve n'est pas toujours très beau à voir...