Crédits Photo : Reuters / Andrea Comas
Bonjour à tous !
Je ne vous apprendrai rien en vous annonçant que le travail est au coeur des débats depuis le début de la crise qui nous touche, en 2008. Différents articles, différentes études montrent, en plus du chômage qui dépasse aujourd'hui les 11% dans l'Union Européenne, une véritable souffrance au bureau, en France plus particulièrement. Encore une fois, étant un républicain idéologue, je rappelle que je fais le choix éditorial de parler de notre pays sur ce blog.
Nous concernant, le taux de chômage dépasse les 10% de la population active, et encore, en ne comptant que les personnes qui ne travaillent pas du tout. Toutes les personnes ayant travaillé partiellement, effectuant un stage souvent mal rémunéré ou en mission intérim avec toute la précarité que cela induit, ne sont pas comptabilisées. Or ne ne peut que constater l'instabilité de leur situation : sans contrat de travail à durée indéterminée, difficile de louer un bien, sans parler de devenir propriétaire. Difficile également de faire des plans à long terme : prévoir des vacances, réparer la voiture ou autre. Nonobstant ce chômage qui nous gangrène, il y a aussi un autre problème sur lequel je souhaite attirer votre attention : la souffrance professionnelle. Elle se manifeste de différentes façons : manque de moyens pour assurer sa tâche convenablement, harcèlement moral, entretien de l'esprit de compétition au-delà du raisonnable, poste mal adapté entraînant des TMS (troubles musculo-squelettiques), insultes de la part de clients, etc.
Si l'on cherche à identifier les causes de ce mal-être, j'en retiendrai principalement trois (même si chacun est libre d'en trouver d'autres) :
-tout d'abord, et c'est un topos, la crise économique : les carnets de commande sont vides, beaucoup d'entreprises, notamment les PME, ont le couteau sous la gorge et beaucoup craignent de devoir mettre la clé sous la porte, entraînant avec elles leur funeste cortège de licenciements ;
-la mondialisation qui, avec la libre-circulation des biens et des capitaux, permet aujourd'hui aux grands patrons libéraux de faire jouer la concurrence entre les pays sans aucun scrupule, obligeant ces derniers à recourir au dumping fiscal et social, privilégiant le moins-disant comme terre d'accueil. En outre, cela a facilité aussi l'arrivée de nouvelles méthodes de management qui, présentées comme modernes aux salariés et aux cadres, sont en fait des façons plus pernicieuses de leur mettre un bon coup de pression : l'open space est ainsi fréquemment incriminé comme un vecteur de mal-être dans les entreprises ;
-enfin, les 35h n'ont rien arrangé, bien au contraire ! En diminuant le temps de travail hebdomadaire, sans perte de salaire qui plus est, cette mesure a permis aux entreprises de justifier un énorme tour de vis en matière d'exigences envers ses employés : tu bosses moins mais tu gagnes autant, alors tu vas produire plus ! Et c'est un fait qui se constate dans les chiffres : la France est l'un des pays les plus productif, sinon le plus productif, de l'OCDE. En outre, les économistes sont globalement d'accord pour dire que les 35h ont, notamment pour la raison que je viens d'expliquer, entraîné un gel des salaires.
Si ce mal-être existe et a tendance aujourd'hui à s'amplifier, il existe toutefois, à mon sens, des moyens d'y remédier, dans une relation gagnant-gagnant, tant pour l'entrepreneur que le salarié. On pourrait commencer par abroger les 35h, revenir aux 39h, avec une renégociation salariale branche par branche à la clé. Pour convaincre les patrons de se remettre à la table des négociations concernant cette éventuelle hausse des salaires, on pourrait en profiter pour repousser l'âge de la retraite, sauf pour les métiers véritablement pénibles. Car c'est un fait : avec 35h hebdomadaires, 5 semaines de congés payés par an et un âge de départ légal à la retraite à 60 ans, nous sommes le pays de l'OCDE qui travaillons le moins. Or, si nous voulons préserver notre modèle social et éviter de dépendre de fonds privés pour payer les retraites de nos séniors, il est urgent de réformer en ce sens. Ensuite, je propose d'avoir une politique familiale et paritaire sensée. La France s'enorgueillit aujourd'hui d'une natalité exceptionnelle. Cependant, avec la hausse du coût de la vie et la paupérisation des ménages, la plupart des couples voient les 2 parents obligés de travailler. Un calvaire quand on sait qu'en plus le pays manque de crèches et de nounous qualifiées. Et puis il est dommage, quand on a rêvé toute sa vie d'être parent, de voir d'autres adultes élever son enfant à sa place. Avec les conséquences que l'on sait : rupture du lien familial, perte de repères de l'enfant, manque d'autorité... Le plus regrettable dans cette histoire, c'est que ce sont souvent les femmes qui en payent le prix sur le marché de l'emploi. Les chiffres le montrent : ce sont elles qui détiennent majoritairement les emplois précaires et à temps partiel, leur salaire n'étant perçu que comme un revenu de complément. Sans compter que leur ascension professionnelle et leur fiche de paie se retrouvent plombées. Il y aurait donc ici matière à réfléchir : pourquoi pas un congé parental de 2 à 3 ans accordé à celui des deux parents qui le souhaite, avec maintien intégral du salaire. Cela concernerait indifféremment le mari ou la femme et s'effectuerait dès le 1er enfant. En compensation, et pour éviter une surnatalité qui grèverait globalement les ressources à notre disposition, on envisagerait un arrêt des allocations familiales à toute famille de plus de 2 enfants.
Enfin, dernière mesure suggérée et non des moindres : le contrat de travail unique. Plus souple que le CDI, plus protecteur que le CDD, il donnerait plus d'assurances à l'entreprise lorsqu'elle embauche un salarié, et ce serait surtout une aubaine pour nos PME, qui sont le véritable socle de notre économie et qui ne sont pas assez protégées dans notre pays. D'un autre côté, le salarié qui n'est pas satisfait de ses conditions de travail, pourrait plus facilement quitter son poste pour espérer trouver mieux ailleurs. Evidemment, une telle loi nécessiterait des garde-fous mais elle mérite qu'on y songe sérieusement. Et puis, bien sûr, une meilleure politique de formation, avec un vrai droit à la formation tout au long de la vie, serait un excellent atout pour former des salariés qui correspondraient véritablement aux besoins de l'économie du pays.
Le travail est véritablement l'enjeu cardinal dans la crise que nous vivons aujourd'hui. Mais il nécessite des réformes courageuses et des concessions importantes, de la part du patronat et des syndicats. Tout cela ne sera possible qu'à la condition expresse d'une réelle volonté politique.